Depuis tout petit il aimait jouer avec des formes. Il entassait les cubes en de grandes tours vertigineuses. Il ne pleurait pas quand elles s’effondraient, parsement le sol de petites formes dispersées. Patiemment, il récupérait ses formes et les remettaient délicatement les unes sur les autres dans un équilibre instable et presque parfait. Plus grand, il continua à ampiler les cartons dans une usine, même pendant la pause. Ils ne tombaient plus. Ils formaient un mur imposant sur lequel il grimpait pour faire une sieste quand il n’en pouvait plus. Dans son sous sol, il avait fait un parc de pièces diverses qu’il posait les unes sur les autres la nuit sans faire de bruit. Il ne cherchait pas à faire une oeuvre d’art, ne prenant pas ses constructions en photo. Elles étaient éphémères et spontanées. Sans raison. Elles finissaient par disparaitre tombant en grappes sur un tapis épais dont il avait recouvert le sol pour que cela ne dérange personne. En dehors de cela, il avait une vie normal … Et pourtant, comme tant d’autres, le terroriste le massacra sans pitié, l’achevant d’une balle dans la tête en criant « Dieu est grand » dans une langue étrange.
Arrivé à son paradis (mettez ce que vous voulez selon votre religion, cela ne changera pas grand chose à l’histoire), il s’assit sur un nuage et chercha des formes. Bien qu’immatériel, il ne perdait pas espoir.
Etonnament, il croisa le terroriste qui lui cherchait des milliers de vierge et un sapin (personne ne savait ce qu’il voulait faire du sapin mais ce n’est pas grave, c’était son fantasme à lui).
– pourquoi m’avoir abattu ? je ne t’avais rien fait ! et d’ailleurs je n’avais jamais rien fait à personne.
– tu existais. tu étais là. pour que je meure dignement, il fallait que tu crèves sauvagement.
– tu es heureux au moins ?
– je me suis fait avoir. Même si je trouve les pucelles, je ne pourrais rien leur faire. Mon sexe est aussi creux que l’était mon cerveau.
– ah, tu prends conscience de ta bétise ?
– oui, j’aurais du voir plus grand et décapiter encore plus de monde. J’aurais été un héros et ma famille aurait été innondée de cadeau
– pas facile de parler avec toi. tu boucles dans ton monde. Dommage qu’il se soit interfacer par erreur avec le mien. tu sais où je pourrais trouver des formes ?
– non. il n’y a pas de pièce ici. Tu crois en quel Dieu ?
– celui qui t’arrange si cela peut te faire plaisir. Je croyais en l’homme et j’ai été très déçu.
– que fais-tu dans mon paradis si tu es incroyant ?
– la même chose que toi, je erre.
Ils se croisèrent plusieurs fois dans les millénaires qui suivirent. Lui n’avait pas trouvé de forme mais continuait sa quête. L’autre passait son temps prostré cherchant l’erreur, après l’horreur.
Au final, ils se disvolèrent tous les deux dans le grand néant ou si vous préférez dans le grant tout. Devenant un, avec beaucoup d’autres, et partageant tout.
Mais même comme cela, chacun pouvant lire les pensées de l’autre, devenir lui en quelque sorte, lui ne comprenait toujours pas l’autre qui se comprenait de moins en moins lui-même.
Cette histoire n’a pas de fin, pas de chute. Juste un brin de désespoir devant la bétise des hommes. Et une once d’espoir pour leur capacité à toujours rester des enfants.